mardi 26 avril 2016

EGLISE SAINT-EUSTACHE - PARIS - Ier arrondissement.

De tous temps ou presque, l'église Saint-Eustache est liée aux Halles de Paris. Sous Philippe Auguste un bourgeois qui avait prêté de l'argent au roi, reçut le privilège de prélever un denier sur chaque panier de poissons vendu aux Halles. Ce bourgeois nommé Jean Alais fit fortune et décida d'en faire profiter les fidèles du quartier. A cette époque, la spiritualité et le sauvetage de l'âme avaient plus d'importance qu'aujourd'hui. Il fit donc construire une chapelle dédiée à Sainte Agnès. Sans doute parce qu'elle contenait d'hypothétiques reliques de ce saint, la chapelle prit ensuite le nom de Saint Eustache et acquit le statut d'église. En 1303, elle devint paroisse.
La légende de Saint Eustache raconte que celui-ci était à l'origine, un général romain qui un jour qu'il chassait le cerf, se retrouva devant l'un de ces animaux qui portait une croix entre ses bois . Après une courte conversation avec son ex-gibier miraculeux, le païen général se convertit et entraîna sa femme et ses deux fils dans l'aventure. Après bien des vicissitudes, comme il refusait de sacrifier aux idoles, toute la famille fut martyrisée vers 118. On les enferma dans un taureau d'airain qui fut chauffé à blanc. L'imagination des Romains en matière "supplicière" était sans limite (à moins qu'il ne s'agisse de celle des hagiographes).
La pose de la première pierre de l'église actuelle eut lieu en 1532. Elle ne fut consacrée qu'en 1637 faute d'argent pour faire avancer les travaux. On n'est pas sûr du nom des architectes quoiqu'on mentionne Boccador (1465-1549) et plus tard Nicolas Le Mercier (1541-1637). De structure gothique, elle apparaît néanmoins comme une église de style Renaissance. Grâce au dégagement créé à l'emplacement des anciennes halles, elle apparaît dans toute sa majesté.


Le portail sud de style renaissance, comporte à son sommet un cadran solaire et une méridienne. Tout en haut, a été aussi disposé une tête de cerf, symbole du saint patron de l'église.







Dès l'entrée, on peut être impressionné par la hauteur des voûtes culminant à trente-trois mètres.











La chapelle de la Vierge présente une Vierge à l'enfant de Jean-Baptiste Pigalle (1714-1785) et de belles peintures de Thomas Couture (1815-1879). Cette chapelle saccagée à la Révolution, fut restaurée en 1803 après la reprise du culte.






Dans le croisillon nord et à son coin avec la nef, figurent trois sculptures, deux bas-reliefs représentant le roi David et Sainte Cécile patronne des musiciens, et un groupe surplombant un bénitier représentant le pape Alexandre II par Eugène Bion (1807-1860).
 


Le monument le plus important est le mausolée de Jean-Baptiste Colbert (1619-1683) qui était le marguillier de l'église. La composition est due à Charles Le Brun, tandis que les sculptures sont de Antoine Coysevox (1640-1720) pour l'orant et la figure de la Foi à droite, et Jean-Baptiste Duby (1635-1700) pour la Fidélité, figure de gauche.
                

Il y a aussi d'autres oeuvres d'art plus modernes dans cette église: telle cette composition de Raymond Mason (1922-) qui représente "le départ des fruits et légumes au coeur de Paris" ou cette présentation lumineuse de Miguel Chevalier, faite de 256 LEDS jouant de leurs reflets sur des parois de polycarbonate et qui s'intitule Voxels Light 2015.

Il faut aussi citer les vitraux ou la belle chaire qui date du XIXe siècle et est due à Victor Pyanet sur des dessins de Victor Baltard (1805-1874).
           

Ce court exposé est loin d'être exhaustif et il existe bien d'autres belles et intéressantes oeuvres dans cette église.



A l'extérieur, on peut s'intéresser à une entrée latérale et admirer le chevet de l'église avec ses commerces ambulants qui montrent que certains ont la nostalgie des anciennes halles.







Jean Béraud (1849-1935) fut un peintre qui représenta le Paris de la Belle Epoque dans toute sa vivacité. Il n'a pas manqué de représenter les Halles et ses commerces avec Saint Eustache en arrière-plan.
Autre peintre moins connu que son arrière-petit-fils Thierry, Léon Lhermitte (1844-1925) à qui on commanda une toile pour l'Hôtel de Ville. Il donne ici un aperçu de la cohue et du dynamisme des Halles au moment de l'approvisionnement. Cette toile est aujourd'hui au Petit Palais.

jeudi 21 avril 2016

MOULIN DE COUARGIS - VERDELOT - SEINE-ET-MARNE.

Le hameau de Couargis sur la commune de Verdelot est un endroit délicieusement bucolique. Il est situé sur le cours du Petit Morin, une rivière qui rejoint la Marne à la Ferté-sous-Jouarre.
En 1895, Léon Bourgeois et ses frères ont acquis un moulin à eau qui se trouvait à Couargis et ont commencé à l'exploiter. Aujourd'hui, la quatrième génération est aux commandes de l'entreprise qui a évidemment dû déménager pour installer un moulin de plus grande dimension à deux kilomètres de là, dans le village même de Verdelot.
Bien qu'il ne soit plus en exploitation, le moulin de Couargis est toujours débout et reste la propriété de la famille Bourgeois. Il a été récemment restauré par M.Guy Agache afin de servir de musée.



Face au moulin, le Petit Morin coule à travers une prairie au milieu de laquelle a été installé un ancien pressoir à pommes restauré. Dans ce système, on peut voir une cage d'écureuil dans laquelle se plaçait un homme qui en marchant, actionnait des engrenages qui faisaient descendre une poutre qui écrasait les pommes.

A l'intérieur du moulin, on découvre la grande roue à aubes (six mètres de diamètre) qui était mise en action par le courant de la rivière.
      
A partir de sa reprise par Léon Bourgeois, ce moulin écrasait le grain à l'aide de cylindres plus performants que l'ancien système à meules. La roue entraînait un système d'engrenages qui actionnaient les cylindres dans lesquelles s'écoulait le grain à moudre. Les machines qui étaient utilisées encore jusqu'en 1935, étaient du même constructeur que celles qui sont utilisées aujourd'hui, à savoir l'entreprise suisse Bülher.
   


Cette espèce d'entonnoir par où descendait le grain entreposé au grenier est plutôt spectaculaire.

Un peu d'histoire : 
Jusqu'à la révolution, les moulins étaient la propriété des seigneurs locaux, des abbayes ou des dignitaires ecclésiastiques. Les meuniers étaient des fermiers au sens où ils travaillaient sous contrat. La pratique courante faisait que le meunier ou son valet partait en chasse-mannée (ou chasse-monnée) pour faire la tournée des fermes avoisinantes et récolter du grain à moudre, et ce, uniquement sur le territoire du seigneur. Ce grain moulu, il ramenait la farine qui en découlait moyennant une rétribution qui restait au meunier. En Brie, cette rémunération pouvait être en moyenne d'un dixième. Ce taux était souvent le sujet de discussions et de marchandages interminables. Il y avait aussi beaucoup de réclamations sur la quantité de farine qui était rapportée au fermier. Beaucoup de meuniers avaient la réputation d'être des voleurs, et pas seulement. En effet, lorsqu'ils se présentaient dans les fermes, ils n'avaient généralement affaire qu'à des femmes, les hommes étant dans les champs. D'où une réputation de trousseurs de jupons, qui n'était pas forcément usurpée.
Le fermage était versé au seigneur en nature (farine, poisson ou volaille) ou en espèces sonnantes. 
Le meunier exerçait un métier qui n'était pas sans risque. Outre les accidents dus à la machinerie complexe et difficile à maitriser, il y avait les sacs d'environ 100 kg à transporter à dos ce qui occasionnait de gros problèmes de sciatiques, lumbagos, voire hernies discales. Un meunier ne vivait généralement pas vieux.
Après la Révolution, beaucoup devinrent propriétaires de leur moulin et leur richesse s'accrut. Ce ne fut pas pour longtemps, puisque le métier se modernisa et à la fin du XIXème siècle, arrivèrent les plus grandes minoteries qui mirent les petits moulins au chômage technique.



Les meules étaient jadis fabriquées en pierre meulière, d'où son nom. Un gisement important se situe tout près de Verdelot, à La-Ferté-sous-Jouarre.



lundi 18 avril 2016

AVENUE DE L'OBSERVATOIRE - PARIS -VIème arrondissement.

Cette avenue fut ouverte en 1798. Elle relie le jardin du Luxembourg à l'Observatoire de Paris qui lui, date de 1672. En 1867, on y créa un jardin qui prit le nom de jardin des Grands Explorateurs Marco Polo et René-Robert Cavelier de la Salle.


Au sortir du Jardin du Luxembourg, on est accueilli par un buste de Gaston Monnerville (1897-1991), oeuvre de Jacques Canonici. Gaston Monnerville, natif de Cayenne fut le président du Sénat après avoir été le président du Conseil de la République, sous la IVe République.







A droite, se situe un beau bâtiment d'inspiration mauresque. Il a été construit en 1895 par l'architecte Maurice Yvon (1857-1911) pour abriter l'Ecole Coloniale puis à partir de 1934, l'Ecole Nationale de la France d'Outre-mer. C'est aujourd'hui l'Institut International d'Administration Publique, absorbée par l'E.N.A..



En suivant la perspective de l'avenue, on découvre toute une statuaire symbolisant le cycle du jour et de la nuit.
Tout d'abord, la Nuit par Charles Gumery (1827-1871), puis le Crépuscule de Gustave Crauk (1827-1905), le Jour de Jean Perraud (1819-1876) et enfin l'Aurore de François Jouffroy (1806-1882). Cette allégorie en a perdu ses bras.
                       



Sur la droite, on peut voir les bâtiments de la faculté de Pharmacie, avec sa large cour entourée d'arcades, dans laquelle apparaît la statue de Louis-Nicolas Vauquelin (1763-1829), laquelle fait pendant à celle d'Antoine Parmentier (1737-1813). Le bâtiment est dû à Charles Laisné (1819-1891) et fut achevé en 1882.
Au coin de la rue Michelet, un autre bâtiment beaucoup plus insolite lui fait suite: l'Institut d'Art et d'Archéologie, appelé communément Centre Michelet. Recouvert de briques rouges, il est l'oeuvre de l'architecte Paul Bigot (1870-1942) et a été construit entre 1925 et 1930 dans un style qui rappelle à la fois la Toscane et l'Afrique subsaharienne.
  Une frise de terre cuite court tout autour de l'édifice et présente en bas-reliefs, des motifs inspirés de la Grèce antique, de Rome ou du Moyen-âge. Ces derniers ont été conçus à la Manufacture de Sèvres.
Un peu plus loin entre la rue des Chartreux et la place Camille Julian, se trouve l'hôpital Tarnier dont la façade austère se trouve rehaussée au coin avec la rue d'Assas par une sculpture en haut-relief de Stéphane Tarnier (1828-1897), obstétricien à qui l'on doit des avancées en matière d'accouchement, telle l'hygiène et la mise au point de forceps. 


Cette sculpture de Denys Puech (1854-1842) date de 1905 et présente le médecin s'occupant d'une parturiente qui tient un nouveau-né dans ses bras tandis qu'un autre nourrisson se trouve dans une couveuse.
En revenant vers le jardin des Grands Explorateurs, on se trouve en présence de ce qui en est l'apothéose : la magnifique fontaine des Quatre Continents due à aux génies conjoints de Jean-Baptiste Carpeaux et d'Emmanuel Frémiet. Pour avoir plus d'éclaircissements, voir l'article sur le sujet en cliquant ici.

              
Un peu plus loin, au milieu de la place Camille Julian, le monument à Francis Garnier est une autre oeuvre de Denys Puech, cité plus haut. 
Francis Garnier (1839-1873), lieutenant de vaisseau servant en Indochine s'employa à explorer le cours du Mékong. Lors d'une mission de pacification à Hanoï, il fut tué par les pirates chinois du Pavillon Noir. Ses cendres furent rapatriées en 1983 et placées dans le socle du monument en 1987.
            

Sur le côté gauche de la place, se trouve la tranchée du RER, ligne B qui se découvre brièvement avant de replonger dans le sous-sol. A travers de la grille, on aperçoit le bâtiment de la station Port-Royal. Cette gare datant de 1895 était une halte sur la ligne du chemin de fer Paris-Orléans, reprise par le RER actuel.

A l'endroit où la ligne redevient souterraine et devant la grille de protection, une sculpture de William Chattaway (1927-) a été installée en hommage à l'écrivain Georges Bernanos (1888-1948).
De l'autre côté de la place Camille Julian, s'élève un monument dédié au Maréchal Michel Ney (1769-1815), duc d'Elchingen, prince de la Moskowa, qui fut fusillé tout près d'ici, pour son ralliement à Napoléon Ier lors de son retour de l'île d'Elbe. Ce monument est l'oeuvre de François Rude (1784-1855).